« Cependant, cela ne fait pas de doute que la société a besoin de constructions symboliques, et plus encore quand elle affronte des faits si difficiles à assumer par la raison. Et c'est de cela dont nous allons parler aujourd'hui, demain et après-demain. Du rôle que joue ou peut jouer l'art dans un débat plus large sur les disparus, de la possibilité de la représentation de l'horreur, des limites de cette représentation et de sa transcendance, ou de sa non-transcendance, politique, et aussi de la question de savoir si les arts du visuel peuvent construire des "lieux". Si elles peuvent jouer un rôle dans la restitution du disparu au temps historique duquel il a été arraché ».
Objet atypique de par l'action publique transversale qu'elle mobilise, la facette financière de l'antiterrorisme a constitué la première réponse de l'administration américaine aux attentats de New York et Washington en 2001. En promulguant le décret présidentiel 13224 le 24 septembre 2001, Georges W. Bush a rendu publique la liste de vingt-sept individus et organisations présumés « terroristes » et a–entre autres choses–ordonné le gel de leurs avoirs financiers. Le front financier a ainsi marqué les prémices de la « guerre contre le terrorisme ». Deux objectifs traversent cet aspect de la stratégie antiterroriste : pister l'argent afin de suivre les « terroristes » à la trace et geler les fonds afin de perturber leurs activités.
Arrêtée par des gendarmes dans un centre d'accueil de la région lyonnaise en octobre 2007, une famille albanaise déboutée du droit d'asile fut envoyée dans un centre de rétention en vue de son expulsion. Malgré la mobilisation associative, le renvoi s'effectua quelques semaines plus tard. D'après la presse, les voisins assistèrent au déploiement en masse des forces de l'ordre et des pompiers dans le but d'empêcher que la famille s'échappe par la fenêtre. Déboutés par la Commission de recours des réfugiés, les membres de la famille étaient convoqués au Tribunal administratif après avoir demandé la suspension de la mesure d'éloignement ainsi qu'un réexamen du dossier. Les gendarmes se dirigèrent toutefois au Centre d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA), forcèrent la porte de la chambre et conduisirent la famille - y compris les enfants - en rétention. Selon un journaliste de Libération, un responsable de l'association gestionnaire s'est défendu répétant : « C'est la loi, rien que la loi. On n'y peut rien ».
Issus d'un colloque organisé à Tanger , les articles de ce numéro ouvrent des perspectives géographiques variées pour décrire la modernité de mondes sociaux construits autour de lieux frontaliers, en tirant parti au niveau économique, culturel et politique de la rupture de souveraineté instituée par la frontière. Ce n'est certes pas nouveau de considérer que les frontières font monde et que s'organisent, en ces bords d'Etat, des lieux très paradoxaux, puisqu'ils semblent nier la possibilité même de la frontière, formant pont et continuité là où, souvent, le politique voudrait rupture et limite, socialement stériles, de l'exercice d'une souveraineté. De nombreux travaux ont déjà mis en evidence les divers usages de la frontière et évoqué la vie sociale, économique, culturelle qui continue bien au-delà des limites territoriales et politiques de la souveraineté, avec son lot d'hybridations et d'enchevêtrement créatifs. Dans la forme impériale de l'Etat, du reste, ce type de frontière floue et poreuse a été codifié et souvent parfaitement organisé comme, par exemple, le limes romain. Les articles présentés ici rappellent fort opportunément que les frontières sont des lieux avant d'être des lignes, et que l'existence même de ruptures en matière de souveraineté est facteur, sinon de solidarités affranchies ou remobilisées par cette rupture, du moins d'opportunités économiques et sociales.
Replaçons dans leur contexte les deux histoires / carrières individuelles autour desquelles s'articule cet article : l'essor du trafic de drogue dans le Nord mexicain depuis les années 1980.
Depuis la fin de la guerre civile, la situation des réfugiés palestiniens au Liban a fait l'objet de nombreuses enquêtes et publications. Il faut dire que, dans l'ensemble du monde arabe, le Liban se distingue par sa politique fort restrictive et discriminante à l'égard de ces « étrangers » dont le statut de réfugié n'est pas officiellement reconnu. Les acteurs politiques de l'après-guerre ont donc érigé une véritable frontière entre Libanais et réfugiés Palestiniens au Liban. On peut même dire qu'une partie de l'identité nationale libanaise s'est reformulée autour de la figure honnie du réfugié palestinien, rendue responsable de la guerre civile que le Liban a connu entre 1975 et 1990. De façon symptomatique, les travaux traitant de la réconciliation post-conflit ont largement laissé de côté la problématique des relations libano-palestiniennes, tandis que la politique de reconstruction / réconciliation mise en place par les gouvernements successifs de la seconde République a purement et simplement ignoré l'existence des réfugiés palestiniens.
Du fait de sa position géographique et de sa réalité historique, le Maramures est depuis toujours une région assez isolée, bénéficiant d'une autonomie interne importante.
Ala fin des années 1970 et au début des années 1980, une sécheresse perma-nente ravage tout le Sahel africain. Outre de nombreuses morts, onconstate que des milliers de personnes migrent d'une région à une autre, endépit des frontières interétatiques existantes. C'est dans ce contexte de criseque des populations nigérianes se mettent à occuper certaines îles camerounai-ses surgies à la suite de l'assèchement du lac Tchad. Peu après, l'administrationnigériane du Borno State appuie cette occupation en y établissant sa domina-tion sur des territoires qui, théoriquement, se trouvent en terre camerounaise.Chose curieuse, l'installation nigériane ne semble pas être considérée commeétrangère. En effet, au moment ou les deux Etats se disputent la paternité decertaines îles du lac Tchad, des populations d'origines diverses (camerounai-ses, nigérianes, maliennes, tchadiennes, centrafricaines, etc.), liées par l'exploi-tation des ressources du lac, notamment le poisson, y vivent en paix.
Israël, souvent présenté comme un pays aux frontières hermétiques, en particulier médiatisées par la construction du Mur de séparation avec les Territoires palestiniens, possède également une frontière longue de 220 km avec l'Egypte, qui semble, quant à elle, fort poreuse à bien des égards. Il existe encore peu de travaux sur cette frontière, bien que cette dernière suscite un intérêt croissant depuis quelques années, avec le passage clandestin de migrants économiques et de demandeurs d'asile, mais aussi en raison de l'intensification de trafics d'êtres humains.
L'étude des migrations contemporaines rencontre la question des frontières sous au moins trois angles. Celui, en premier lieu, des frontières étatiques dont la mise en place et le développement ont été analysés comme l'élément politique permettant de distinguer l'immigration moderne d'autres formes de migrations, lorsqu'un migrant franchit une frontière juridique etdevient un étranger. Celui, en deuxième lieu, de la recherche urbaine quimontre que les grandes métropoles, tout en constituant plus que jamais desdestinations pour les migrants, voient se développer des frontières sociospatiales résultant de l'action de ceux qui cherchent à se protéger de l'altérité. Celui, enfin, des travaux sur l'ethnicité soulignant que des frontières ethniques se construisent dans les relations entre immigrés et populations plusanciennement installées.