Au-delà des discours souvent standardisés et galvaudés sur les « nouvelles missions » militaires en opération extérieure (« Opex ») de « paix » ou de « stabilisation », ce numéro de Cultures Conflitsse propose de déplacer le regard sur ces pratiques internationales de coercition pour les éclairer par un certain nombre de problématiques historiques, politiques et sociologiques plus larges. Ce « décentrement » du regard découle ici de trois constats.
« Chaque fois que les incidents de guerre obligent l'un de nos officiers à agir contre un village [...], il ne doit pas perdre de vue que son premier soin, la soumission des habitants obtenue, sera de reconstruire le village, d'y créer un marché, d'y établir une école. C'est de l'action de la politique et de la force que doit résulter la pacification du pays et l'organisation à lui donner plus tard ». Général Gallieni, instructions fondamentales du 22 mai 1898 à Madagascar.
"Cada vez que los incidentes de guerra obligan a uno de nuestros oficiales a actuar contra una población [...], no debe olvidar que su primera preocupación, una vez que se haya obtenido la sumisión de sus habitantes, ha de ser la de reconstruir dicha población, crear un mercado, construir una escuela. La pacificación del país y, más tarde, la organización que se le ha de otorgar, han de resultar de la acción de la política y de la fuerza". General Gallieni, instrucciones fundamentales del 22 de mayo de 1898 en Madagascar.
Dans cet article, nous déclinons dans un premier temps les différentes significations données dans la pensée stratégique occidentale à l'acte militaire de « tuer au combat » au regard du thème de la reconnaissance de l'ennemi. Nous montrons ainsi que trois grands récits historiques, aux implications très différentes quant à la reconnaissance de l'adversaire, se sont sédimentés dans cette pensée. Dans un deuxième temps, nous cherchons à comprendre les discours militaires américains sur l'ennemi insurgé en Irak à la lumière de ces trois grands récits, cela en nous intéressant plus particulièrement à la stratégie américaine de sortie du conflit d'Irak entre 2007 et 2011. Notre argument principal est que ces récits historiques ont en été au cour du processus qui a conduit la hiérarchie militaire à avaliser les négociations avec l'opposition armée irakienne. Ils permettent en effet d'éclairer comment le constat de l'échec à éradiquer « l'insurrection irakienne » par la voie militaire s'est mué en reconnaissance contrariée des revendications politiques de certains d'entre eux.